François Afif BENTHANAME, Fondateur de ZUP de CO

Interview faite le 6 janvier 2015, dans les bureaux de Zup de Co, Paris : encore une fois ce témoignage résonne particulièrement fort dans l'actualité de ces dernières semaines : "l'échec scolaire est à la base de tous les maux"!

Changer les choses : c'est pourquoi je m'engage, depuis dix ans...

 

 

Education, un bout du monde ? Non, tout se joue au collège

 

ZUP de CO, comment naît cette idée ?

Un projet, c’est d‘abord partir d’un stylo et d’une envie. Ensuite, il faut de vrais objectifs et faire de la promotion : c’est mon quotidien.

Dans le monde de l’éducation on sait tous qu’être en échec est à la base de tous les maux : précarité, chômage, délinquance, problèmes de santé, etc.

On sait aussi que l’échec scolaire ne vient pas uniquement de difficultés scolaires : faire confiance aux enfants et les soutenir dans leur apprentissage, c’est donc l’essentiel.

A partir de là, il faut être efficace : je gère cette association comme une entreprise classique fondée sur la culture du résultat  Mais en association, la plus-value n’est plus financière… elle est humaine ! On a commencé comme tout le monde, par accompagner un enfant une heure par semaine : ça ne marche pas. Tout le monde fait ça depuis 30 ans et ça ne marche pas ! On s’est dit alors qu’il fallait travailler sur la durée, au minimum sur 4 ans. Et si l’on ne s’occupe ni des primaires ni des lycéens, c’est qu’on ne peut pas tout faire. Il faut bien cibler (les primaires, avec les étudiants, sont trop petits) et choisir un domaine dans lequel être très bon.

Au collège, l’objectif c’est obtenir une note supérieure à 10

Le collège : étape clé du développement de l’enfant, vers l’âge adolescent puis adulte, c’est la période parfaite où les élèves savent en principe lire, écrire et compter. Si certains ont des difficultés, c’est à ce moment-là qu’on peut les aider.

Je m’occupe donc des enfants qui ont une moyenne inférieure et que j’accompagne pendant 3 ans. Aux parents je dis : « Prenons notre temps, ils progresseront d’un ou deux points par an, mais il faut d’abord qu’ils travaillent sur l’estime d’eux-mêmes et la  confiance en eux. »

Supprimer les devoirs à la maison

Et ce n’est pas encore suffisant ! Le vrai problème, c’est de supprimer l’obligation des devoirs tous les soirs : c’est l’objectif déclaré en 2014. Et le combat des 5 prochaines années : obtenir qu’une loi soit votée qui impose la suppression des devoirs à la maison et leur encadrement à l’école.

Chacun ici œuvre à cet objectif. Carole, directrice déléguée, manage 12 à 14 personnes en province, à Lille, Lyon, Rennes, Bordeaux… Laurence s’occupe des Services civiques. Un autre s’occupe de la partie financière, une autre de la communication, etc.

Le recrutement des étudiants

On organise dans les grandes écoles ce qu’on appelle le Campus Comedy Tour, un festival d’humour, concours de l’étudiant le plus drôle de l’école. L’idée est de remplir le campus pour une soirée avec 300, 400 étudiants, de faire venir un humoriste connu et de présenter Zup de Co pendant cinq minutes : on recrute alors sur place. D’accord avec les directions, on intervient aussi dans les amphis où l’on présente Zup de Co et les objectifs de l’association avant les conférences.

Cela fait 7 ans maintenant que ces partenariats sont installés. L’association a 10 ans : pendant 3 ans on a cherché à améliorer le système et on le remet depuis tous les ans en question : comment améliorer notre process ? Comment améliorer nos relations avec les collèges ?

Services civiques, numérique… les enjeux à venir

Comment installer des services civiques sur place ? Améliorer la coordination ? Le recrutement des étudiants ? Leur formation ?

Les services civiques existent depuis trois ans : comment être plus efficaces ? Comment accompagner leur formation ?

S’adapter au numérique, favoriser les sorties culturelles, multiplier les rencontres entre étudiants et collégiens… des chantiers indispensables.

Des objectifs clairs, mais aussi des échecs : il n’y a que ça ! C’est ce qui est passionnant parce que nous sommes dans la pâte humaine. Nous intervenons auprès d’enfants qui ont moins de 10 de moyenne en maths et en français et on aimerait que 100 % d’entre eux dépassent rapidement la note de 10 après un ou deux ans mais ce n’est pas le cas… C’est plutôt de 20 à 70 %, selon les cas.

Etudiants-Zupdeco Organisation à but non lucratif https://fr-fr.facebook.com/etudiantszupdeco

Quand les sondages montrent que pour une grosse partie des parents les devoirs sont un facteur de stress voire anxiogènes, Zup de Co met en place son dispositif de devoirs vérifiés à l'école encadré par des Jeunes en Service Civique en plus des séances de tutorat individuel.

http://www.youtube.com/watch?v=w-BhVDZ3-sM

Avec les devoirs encadrés tous les soirs, je pense qu’on se rapprochera des 90 % d’enfants au-dessus de la moyenne. Ce qui est important c’est de faire progresser les enfants dans le temps et de les faire se rapprocher de la moyenne. A partir de là on peut mesurer l’écart entre la moyenne de l’enfant et celle de la classe : ses notes doivent s’en rapprocher, voire la dépasser. En comparant avec des populations-témoins, nous obtenons 85 % de réussite au brevet des collèges vs 35 % pour la population-témoin. Nous sommes dans la bonne direction.

C'est l'idée qui porte aussi la Web Académie lancée en 2010

Web@academie : Zup de Co lance une formation de ..

Web@cadémie
  • Une école gratuite
  • Pour les jeunes filles et garçons entre 18 et 25 ans
  • Sortis du système scolaire
  • Sans qualification
  • Faire de leur passion un métier
  • Dans un secteur en forte demande
  •  
  • Prochaine rentrée AVRIL 2015.

 

 

 

Web@cadémie

de

http://vimeo.com/98775246

 

Notre rôle est d’identifier les acteurs qui font des choses efficaces, de les fédérer, d’appliquer cette efficacité à tout notre travail et d’arriver à mettre en place les meilleures pratiques.

Le numérique va beaucoup nous y aider.

J’ai créé la Web-Acacémie Web@cadémie: Présentation il y a 5 ans. C’est un pôle de Zup de Co : des jeunes qui n’ont pas leur bac sont formés aux métiers de développeur-web en deux ans avec Epitech  Ecole Informatique - Epitech - école d'informatique ... Les jeunes qui vont jusqu’au bout de la formation, la première année, sont en apprentissage la 2ème année avec un contrat de professionnalisation. Ils gagnent déjà un peu leur vie et 10 % d’entre eux, à l’issue de ces deux ans, trouvent un job très  bien payé. Leur vie est alors assurée.

Nous avons déjà pu former plus de 300 personnes, garçons et filles (on en perd en moyenne 30 % par an qui se rendent compte que l’informatique n’est pas forcément leur truc), qui sont sélectionnés au moyen des préformations mises en place. L’objectif est de les mettre en situation d’exercice de leur futur métier… certains n’y tiennent pas ! La Web Académie,  c’est aujourd’hui plein de projets, comme l’école « 42 »… École d'Informatique 42 - 42.fr‎C’est de l’emploi direct, avec beaucoup d’acteurs très intéressants !

 

Fédérer les initiatives pour créer un bouquet éducatif

Avec le soutien du ministère de l’Education nous sommes maintenant acteur sur la scène nationale où l’on fédère des associations complémentaires les unes des autres. Ce qui sera important, c’est de ne plus y être dans 20 ans ! Que les choses aient bougé et que le problème soit réglé.

Nous avons monté un programme avec Alexandre Jardin :Zup de Co - Bleu Blanc Zèbre. Avec le programme Lire et faire lire | Un appel aux bénévoles pour partager ..., mis en place en grande section de maternelle et en CP, des personnes retraitées viennent lire des livres aux enfants pour les encourager eux-mêmes à ouvrir un livre ; et l’association intervient non pas une fois par semaine mais tous les jours... Lire c'est partir vend des livres à moins d’un euro pour les enfants en primaire ; on va les aider à en vendre le plus possible pour qu’un maximum d’enfants aient accès à la lecture. Et puis il y a la Cartographie des Savoirs - Accueil  : avec Educlever - Accuei et le e-learning, on peut évaluer les notions que maîtrise ou non un enfant… une fois déterminés quels sont les exercices qu’il doit faire pour régler son problème, on peut faire ensuite de la remédiation.

Avec ces programmes, on a moins d’enfants qui, arrivés en 6ème, ont toujours des difficultés et, au collège, c’est nous Zup de Co qui intervenons. Au lycée, nous aurons d’autres partenaires.

Notre fil rouge, c'est le collège

Nous sommes aujourd’hui nombreux… On a commencé avec une feuille et un stylo ! C’est toujours comme ça, j’ai toujours fait ça pendant 25 ans, pour créer toutes les entreprises que j’ai lancées. Au départ on est seul, puis 2 puis 3, puis 10… C’est une entreprise qui grandit grâce à toutes les personnes qui s’y engagent qui sont les salariés… je ne crois pas au bénévolat dans la mesure où l’organisation doit être matérialisée autrement qu’en donnant son temps. Etre salarié, ça change les choses !! Et puis, en restant concentrés sur le collège, nous assurons le succès de Zup de Co : ne pas sortir de ce sillon mais créer des liens avec d’autres structures dont la spécialité n’est pas le collège mais avec qui on peut mutualiser des moyens et créer des passerelles primaire-collège-lycée : l’idéal ce sera la Carte Vitale scolaire : en cas de difficulté l’élève sera pris en charge par la structure qui pourra le mieux la résoudre… chantier à venir !!

 

Le soutien scolaire, un bout du monde
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